Commentaire: neutraliser les FDLR
Le dialogue politique semble de plus en plus être la seule manière de résoudre le problème des milices rwandaises dans l’est du Congo.
Commentaire: neutraliser les FDLR
Le dialogue politique semble de plus en plus être la seule manière de résoudre le problème des milices rwandaises dans l’est du Congo.
La résolution 1804 fait suite à un accord signé en novembre 2007 à Nairobi entre la RDC et le Rwanda dans lequel les deux pays s’étaient engagés à mettre fin à la présence de groupes armés étrangers dans l’est du Congo, particulièrement les Forces démocratiques pour la libération du Rwanda, les FDLR.
Plusieurs milliers de FDLR subsistent au Congo - nombre d’entre eux ayant fui le Rwanda suite au génocide de 1994. Ces milices rwandaises sont accusées d’avoir participé aux massacres et elles continuent à commettre de graves crimes dans l’est de la RDC. Sans surprise, leur présence aux côtés d’autres groupes armés rwandais illégaux tells que les Rastas et les ex-FAR/Interahamwe a eu une influence déstabilisatrice sur la sécurité dans l’est du Congo depuis qu’ils sont arrivés.
L’adoption de la résolution du 13 mars montre que le Conseil de Sécurité pense aussi que ces forces constituent un vrai danger et une menace à la paix et à la stabilité, non seulement en RDC mais aussi dans l’entière région des Grands lacs.
Outre le dépôt des armes, la résolution appelle les FDLR et autres combattants rwandais à “[cesser] immédiatement de recruter et d’utiliser des enfants, [libérer] tous les enfants dans leurs rangs et [mettre] fin aux actes de violence sexiste, en particulier le viol et les autres formes de sévices sexuels”, soulignant que les responsables de ces crimes doivent être traduits en justice.
Mais pourquoi la résolution 1804 ne concerne-t-elle pas également les troupes de Laurent Nkunda ? Ceci est regrettable étant donné que la question des FDLR doit également être traitée dans le cadre du processus de paix de Goma qui était supposé conduire au désarmement de tous les groupes armés opérant en RDC. Il est illogique de séparer ces deux processus. Cette résolution 1804 doit aussi concerner les groupes armés Congolais opérant à l’est, y compris les homes de Nkunda.
Le Conseil de sécurité a déclaré qu’il est déterminé à prendre des sanctions ciblées contre les chefs des FDLR, particulièrement contre ceux qui continuent à s’opposer au désarmement et la démobilisation de leurs troupes. De telles sanctions concernent le gel des avoirs et une interdiction de déplacement, mais ces sanctions ne vont évidemment pas affecter la capacité de nuire des groupes armés.
En ce qui les concerne, les FDLR insistent sur le fait qu’ils ne sont pas la cause de l’insécurité continue dans la région et affirment qu’ils sont déterminés à retourner au Rwanda.
Mais ils ont déjà fait de telles déclarations par le passé.
Dans une déclaration faite à Rome en mars 2005, les FDLR avaient indiqué qu’ils allaient désarmer de manière volontaire et retourner au Rwanda. Les chefs civils et militaires des FDLR ont annoncé dans une déclaration publique qu’ils avaient l’intention de mettre fin au conflit armé, de condamner le génocide de 1994 et de déposer leurs armes.
Ils se sont également engagés à adhérer au programme de désarmement, démobilisation, rapatriement, réinstallation et réintégration qui aurait eu pour conséquence leur intégration à l’armée rwandaise ou leur retour à la vie civile.
Le Congo était censé aider au processus de désarmement avec l’aide de la Mission des Nations Unies au Congo, MONUC.
En retour, les FDLR ont demandé au gouvernement rwandais de leur donner un rôle actif dans la vie politique. Ils ont également demandé au gouvernement congolais d’établir un comité de suivi avec lequel ils pourraient discuter des modalités de leur désarmement et de leur rapatriement. Ce comité n’a jamais été mis en place et la déclaration de Rome n’a pas abouti au désarmement ou au retour des FDLR.
Une résolution du Conseil de Sécurité du 8 novembre 2001 qui suggérait que la MONUC et l’armée congolaise désarment les combattants étrangers n’a pas non plus eu cet effet. La résolution 1804 n’est donc pas la première de son espèce.
Le désarmement forcé s’étant montré infructueux, et le temps étant vraiment venu de mettre fin à la présence des FDLR et des autres groupes armés rwandais en RDC, la seule réponse possible est le dialogue.
Et les FDLR semblent disposés à parler. Ils ne rentreront pas chez eux dans les conditions actuelles et exigent des pourparlers directs avec le gouvernement rwandais sous l’égide de la communauté internationale.
Un des problèmes qui se pose est de savoir si le Rwanda va les accepter. Il s’agit là de la plus grande difficulté. Mais cela ne devrait pas être un problème pour le Congo. Il appartient à la communauté internationale de trouver une solution politique à la situation des FDLR situation, notamment à travers un dialogue politique entre ce groupe et le gouvernement rwandais.
Pour certains observateurs, la Monuc devrait se être convertie en une force militaire pour forcer la main à ces groupes armés rwandais opérant au Congo. Mais l’impuissance de la MONUC et la désorganisation de l’armée congolaise sont des facteurs qui entraîneraient probablement l’échec de toute tentative de désarmement forcé.
Il n’existe pas de solution militaire au problème des FDLR. Pour preuve, les forces armées rwandaises ne sont jamais parvenues à venir à bout des FDLR en six ans de présence militaire au Nord et Sud Kivu. Cet échec est du à leur stratégie militaire et également au fait qu’il était difficile de distinguer les FDLR de la population civile rwandaise déplacée.
Si les FDLR refusent de désarmer volontairement, il y a un risque d’une autre guerre dans la région avec le retour de l’armée rwandaise sur le territoire congolais.
Il faut donner la priorité à une solution politique afin d’éviter de nouvelles confrontations ou de nouveaux combats.
L’engagement du Conseil de Sécurité dans la recherche de la paix dans la région des Grands Lacs, notamment dans l’est du Congo, est le bienvenu mais le Congo a besoin de toute la communauté internationale, y compris l’Union Européenne.
Les combattants étrangers opérant au Congo doivent être identifiés, les capacités de la MONUC améliorées et leur mandat renforcé pour leur permettre de mieux protéger la population civile. Il faut aussi réfléchir au destin des FDLR après leur désarmement et leur rapatriement et œuvrer pour la fin des combats à l’est.
Le Congo ne doit pas continuellement souffrir de la présence de ces groupes armés rwandais dans son territoire.
Eugène Bakama Bope est le président du Club des amis du droit du Congo.