Des querelles entre clans menacent la paix
Certaines vendettas sont trop violentes pour les cérémonies de justice traditionnelle.
Des querelles entre clans menacent la paix
Certaines vendettas sont trop violentes pour les cérémonies de justice traditionnelle.
Akello est inquiète parce que son ancien village, situé dans la commune de Pajong, non loin du camp de réfugiés de Kitgum qui a été son foyer depuis plusieurs années, est encore trop dangereux.
Le danger ne semble pas venir des combattants rebelles, mais du clan Pajong, des rivaux du clan Akello.
Un membre du clan Pubec est accusé d’avoir provoqué un massacre par l’ARS de plus de 50 personnes dans la commune de Pajong en juin 2002, il y a près de six ans, comme l’a expliqué Akello.
La colère et le désir de vengeance culminent au sein du clan Pajong, qui domine la commune de Pajong, s’est lamentée Akello, à tel point que des membres du clan Pubec craignent d’être tués ‘ils rentrent chez eux.
Malgré un droit légal à la terre, les Pubec ont été avertis par Pajong de ne pas revenir.
"Je prie que ces gens nous pardonnent, [tout juste] comme ils ont pardonné [le chef de l’ARS Joseph] Kony, pour que nous puissions jouir d’une paix durable,” a déclaré Akello à l’IWPR. “Nombre d’entre nous sont innocents, mais nous souffrons à cause des fautes de quelqu’un d’autre.”
Jusqu’à présent, les Pubec n’ont pas remis les pieds dans la commune.
"La restriction est si stricte que les femmes n’ont même pas le droit d’aller chercher du bois de chauffage dans la commune de Pajong,” a-t-elle dit. “Cela nous rend la vie plus difficile. Je prie que le gouvernement intervienne sur cette question."
Akello craint que rien ne change sans de nouveaux affrontements ou l’intervention et la protection du gouvernement.
Bien que des responsables locaux aient essayé d’utiliser la cérémonie de réconciliation très médiatisée du mato oput, pratiqué par la tribu Acholi, ceci, et d’autres efforts, n’a pas permis de ramener la paix entre les clans.
Le différend entre les clans a également distillé des doutes quant à l’efficacité des méthodes traditionnelles de résolution de conflit. Les rebelles affirment qu’ils se soumettront uniquement à de telles cérémonies si un accord de paix est signé, rejetant les tribunaux nationaux.
Des responsables du nord de l’Ouganda affirment que de tels différends sont le résultat inévitable de plus de 20 années d’une guerre avec l’ARS, qui a provoqué le déplacement de près de 2 millions de personnes et fait quelques 100 000 morts.
Kony et ses trois commandants principaux ont été inculpés par la Cour pénale internationale, CPI, à La Haye, pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, mais les négociateurs rebelles pour la paix affirment qu’ils ne donneront pas leur aval à une paix permanente, tant que les actes d’accusation ne seront pas levés.
Il y a de grandes craintes, entre-temps, que de tels différends entre clans et actes de revanche deviennent de plus en plus fréquents alors que les gens, encouragés par la paix relative dans la région, commencent à rentrer dans leurs villages d’origine.
Samson Alara, un haut responsable du comté de Chua a indiqué à l’IWPR que la cause de l’affrontement clanique de la commune de Pajong peut être lié aux rebelles de l’ARS qui auraient enlevé un membre du clan Pubec appelé Katende Otim, qui s’était installé dans la région.
Alors qu’il était détenu par les rebelles, Otim leur aurait dit qu’il était membre du clan Pajong, et aurait affirmé que certains Pajong étaient ses proches.
Otim avait finit par s’échapper des mains de l’ARS après s’être saisi d’un AK-47. L’ARS envoya deux hommes pour le récupérer mais Otim les tua et pris la fuite vers Masindi, dans l’ouest de l’Ouganda, où il vit toujours.
Furieux du meurtre des deux membres de l’ARS par Otim, les rebelles se rendirent chez l’homme qu’Otim avait décrit comme son père, et, malgré les revendications de la famille qu’ils n’étaient pas liés à Otim, ils tuèrent 14 membres de la famille. Seuls deux garçons qui n’étaient pas dans la maison à ce moment précis survécurent.
Quelques autres 42 personnes, pour la plupart Pajong, furent également tuées lors du massacre qui inclut des personnes des clans Akara et Bura, ainsi que des Pubec, a indiqué Alara.
L’ARS laissa un mot expliquant la raison de la tuerie et qu’Otim avait prétendu appartenir à cette famille.
Alara a indiqué que des chefs locaux à Kitgum ont, sous la supervision du chef suprême des Acholi, Rwot David Onen Acana ll, procédé à une cérémonie de purification en 2005 pour réconcilier les deux clans dans l’espoir que les Pajong autoriseraient les Pubec à revenir.
Parmi d’autres choses, la cérémonie requiert que les parties adverses boivent un thé amer fait à partir de la racine d’un arbre local, marchent sur un oeuf puis au dessus d’un bâton pour symboliser un nouveau départ pour les deux parties.
Mais les Pajong ont refusé de suivre les consignes de la cérémonie, selon des responsables, malgré le fait que la cérémonie soit utilisée pour la résolution de nombreuses autres tueries commises par l’ARS.
"Nous avons pensé que les Pajong pardonneraient aux Pubec après le sacrifice d’un agneau et d’un taureau sur la scène du massacre, mais les Pajong n’ont visiblement toujours pas pardonné aux Pubec," a indiqué Alara.
Alara a déclaré que les Pajong réclamaient une réparation de deux taureaux pour chaque famille affectée. Mais comme les Pubec n’ont pas d’argent, les Pajong veulent que le gouvernement octroie une réparation après la fin officielle de la guerre.
"La question es tellement compliquée que les Pubec ne peuvent pas [la] traiter. Much as the Pajong have not hurt anybody, they are using verbal threats, promising revenge, should the Pubec go to Pajong parish,” said Alara.
"Les Pajong ont totalement refusé de pardonner aux Pubec et jurent qu’ils ne retourneront pas dans leur zone, même après le mato oput."
Alex Oyet, le responsable du district, qui appartient au clan Pajong, a déclaré à l’IWPR que de nombreuses femmes Pajong qui avaient été tuées par l’ARS avaient d’abord été forcées de tuer leurs propres bébés avant d’être assassinées à leur tour.
“C’…était une cruauté extrême qu’ils trouvent impardonnable," a déclaré Oyat au sujet des Pajong.
"Le comportement de la communauté Pajong envers les Pubec est une indication que … la vengeance va avoir lieu si le problème n’est pas traité correctement et rapidement."
Caroline Ayugi est journaliste de l’IWPR à Gulu.