La CPI rencontre encore des difficultés dans les affaires de viol
Selon les activistes, la Cour a amélioré ses résultats dans la poursuite des crimes à caractère sexuel mais les obstacles à la justice persistent.
La CPI rencontre encore des difficultés dans les affaires de viol
Selon les activistes, la Cour a amélioré ses résultats dans la poursuite des crimes à caractère sexuel mais les obstacles à la justice persistent.
Selon les experts, malgré les progrès faits par la Cour pénale internationale,
“[Au fil des années] le Bureau du Procureur, BdP, a amélioré de manière significative la manière dont il traite les crimes sexuels,” a déclaré Carla Ferstman, directrice de Redress, une organisation de défense des victimes basée à Londres. “C’est mieux, cela ne veut pas dire que c’est bien, mais ça s’améliore.”
Par le passé, la
Dans la première affaire de la
Cependant, les groupes de défense des droits des victimes indiquent que depuis l’ouverture de l’enquête dans l’affaire Lubanga, la
“La [Fédération internationale des droits de l’Homme] et d’autres organisations ont porté ce fait [que les crimes de violence sexuelle ont été omis] à l’attention du procureur, Luis Moreno Ocampo, et aujourd’hui, c’est une [zone de] grand progrès pour la
Le viol systématique a été et continue à être utilisé comme une arme de guerre dans l’est de la
D’après une étude de l’initiative humanitaire de Harvard (Harvard Humanitarian Initiative) réalisée l’année dernière, 60 pour cent des victimes de violence sexuelle dans l’est de la
“Parfois les viols sont si violents qu’ils provoquent la mort de la victime,” a expliqué une victime de viol à l’IWPR. “Les femmes peuvent être violées à tout moment dans la journée et partout: dans les champs, chez elles, au marché, sur la route, au puits. [Cela] nous détruit corps et âme.”
Les enquêtes sur les crimes de violence sexuelle diffèrent nettement de celles portant sur les autres types de crimes poursuivis par les tribunaux internationaux. La collecte des témoignages nécessaires par des méthodes d’interrogatoire délicates, ainsi que l’obtention de preuves médicales jouent un rôle crucial dans la reconnaissance de culpabilité une fois qu’une affaire arrive devant la cour. Cependant, les victimes sont souvent réticentes à venir dénoncer une attaque qu’elle ont subie et l’obtention des preuves qu’un viol a bien eu lieu peut s’avérer très difficile quand l’accès à l’hôpital n’est pas garanti et compte tenu du fait que la nature-même du crime exclut souvent la présence de témoins.
“Il y a souvent certaines difficultés liées aux enquêtes sur la violence sexuelle,” a expliqué Pascal Turlan, conseiller sur la coopération internationale au sein du BdP à La Haye. “Il est très difficile d’identifier et de localiser les victimes, le système d’archivage des [juridictions locales] est souvent en très mauvais état dans les pays où les enquêtes sont menées, mais il est aussi très difficile de trouver des documents prouvant qu’un viol a eu lieu.”
La deuxième affaire instruite par la
D’autres auteurs de crimes sexuels présumés ont été récemment traduits devant la
“[La violence d’origine sexuelle] est un crime vraiment significatif dans la situation du Congo; il est extrêmement important dans l’affaire Mbarushimana, alors il sera essentiel que la Cour aborde cette question - que le BdP s’en occupe,” a déclaré Ferstman.
Alors que certaines des difficultés dans la poursuite de crimes sexuels sont liées aux procédures d’enquêtes, d’autres découlent de l’expérience traumatisante des victimes et du fait qu’elles ne veulent pas en parler.
“Quand vous êtes violée dans la plupart des cas vous faites l’objet de la discrimination et de la moquerie. Vous êtes tout le temps montrée du doigt par vos voisins,” a expliqué une femme violée de la ville de Masisi dans Nord Kivu. “Cela veut dire que vous restez chez vous pour que les gens ne sachent pas que vous avez été violée.”
La nature des crimes sexuels complique la collecte de preuves contre un auteur précis, en particulier dans l’environnement rural de l’est de la
“Nous ne savons pas comment faire appel à la justice parce que, même si nous le faisons, souvent les violeurs s’enfuient après avoir commis leur crime et vous ne pouvez pas les traduire en justice,” a déclaré une autre victime à l’IWPR.
Un autre problème dans la collecte des éléments de preuve nécessaires pour prouver le viol vient du fait que la plupart des victimes ne vont pas se faire examiner à l’hôpital. Pour les procureurs, il est alors difficile de prouver au delà du doute raisonnable qu’un viol a eu lieu.
Dans un récent contre interrogatoire de la défense en l’affaire Bemba, une victime de viol s’est vue interrogée sur la raison pour laquelle elle n’avait pas de certificat médical confirmant qu’elle avait été violée.
“Dans notre pays si vous voulez voir un docteur à l’hôpital vous avez toujours besoin d’argent. Quand j’ai été violée je n’avais pas d’argent, je ne pouvais pas voir un docteur,” a-t-elle répondu.
Turlan a confirmé que le manque d’accès aux infrastructures médicales après un viol est un véritable obstacle pour les procureurs.
“La plus grande difficulté est que la plupart des victimes ne se font pas examiner par un médecin après le viol et qu’il n’existe donc pas de compte-rendu médical du viol. C’est un élément très important dans le traitement de telles affaires,” a déclaré Turlan.
Ferstman a indiqué que la
“[La
Selon Ferstman, la
La
“La première préoccupation du Bureau du Procureur dans les enquêtes sur des crimes et les crimes à caractère sexuel en particulier est de [garantir] la protection des victimes, d’aborder leurs préoccupations et de s’assurer qu’il sera en mesure de parler à des témoins,” a expliqué Turlan à l’IWPR.
“Nous avons également mis en place une unité consacrée aux questions sexospécifiques et aux enfants qui soutient les équipes d’enquête dans l’approche des victimes, [protégeant] leur santé mentale et physique et leur bien être et abordant leurs préoccupations.”
Afin de protéger les victimes de viol témoignant devant la Cour des dangers auxquels elles pourraient être exposées, la
“Garder profil bas, être aussi discret que possible dans nos interactions avec les organisations locales et faire en sorte que nos contacts avec les victimes et les organisations locales restent aussi confidentiels que possible fait partie de notre procédure opérationnelle et contribue dans une grande mesure à l’objectif de garantir une représentation adéquate des souffrances des victimes de violence sexuelle devant la Cour tout en les protégeant,” a déclaré Turlan.
Turlan a expliqué que la
“La
Cependant, la Cour reconnaît que bien que certaines victimes osent se présenter pour permettre aux procureurs d’enquêter sur des auteurs présumés, le principal défi reste que la majorité des victimes préfèrent ne pas parler de leur expérience.
“La plupart des victimes sont réticentes à parler de la violence sexuelle, qui est déjà un sujet tabou dont les victimes ont encore plus de mal à parler quand elles ont été contaminées par le VIH après un viol,” a expliqué Turlan. “D’autres sont traumatisées [par leurs expériences et cela résulte] souvent en un rejet par leur familles et la société. En outre, elles ne pourront plus se marier.”
Les experts pensent que la
“D’une certaine manière, la
Passy Mubalama et Espérance Nzigire sont des reporters formés par l’IWPR à Goma.